Légendes à la veillée

C’était la coutume de se réunir entre voisins, les soirs d’hiver, autour de la cheminée pour partager les nouvelles et se raconter des histoires transmises oralement depuis des temps immémoriaux..

Les légendes

( du latin “legendus”: qui doit être lu, cueilli, entendu..)

À la différence des contes de fées, elles racontent les mystères qui entourent un lieu, un monument, un animal et possèdent multiples versions, nées de l’imagination ésotérique des hommes.

Et pour seul éclairage, les flammes dansantes de la cheminée dessinaient des fantômes sur les murs et ajoutaient à la magie de ces moments qui unissaient toutes les générations dans le merveilleux.

Elles sont légion en Bourgogne, comme dans toutes les régions de France, et il existe à quelques lieues de chez moi, un château fort étrange qui cache sa légende ainsi que de multiples secrets  en ses ruines majestueuses,

Le château-fort de Montfort

Au XIe siècle (vers 1075) un premier château aurait été édifié par Bernard de Montfort, un proche des ducs de Bourgogne dont le château le plus proche était à une dizaine de kilomètres, à Montbard.

Le premier secret serait celui de la création de l’Ordre des Templiers, les moines-soldats auquel ce seigneur aurait participé avec Bernard de Clairvaux, fondateur de nombreuses abbayes cisterciennes, dont Citeaux. Tous deux auraient envoyé les 9 premiers templiers à la recherche du Saint-Graal, enfoui sous le temple du roi Salomon, à Jérusalem.

Nul n’a jamais su s’ils l’ont trouvé..

Le second secret : ce château aurait également abrité le Saint-Suaire, pendant quelques centaines d’années :

Il serait entré en possession de cette relique grâce à Othon de la Roche, croisé bourguignon de la quatrième croisade, qui l’aurait prise pendant le sac de Constantinople en 1204. L’existence de cette relique reste secrète dans cette famille jusqu’au milieu du xive siècle. L’arrière-petite-fille d’Othon de la Roche, Jeanne de Vergy, épouse Geoffroi de Charny en 1340.

La légende de la Princesse Amélie

Elle était jeune et belle, très aimée de ses gens et fort pieuse;
malheureuse pourtant, car son époux était un seigneur brutal dont la seule passion était la chasse.

Un soir de Noël, elle l’avait supplié d’assister avec elle à la messe de minuit qu’elle célébrait dans la chapelle du château.Il avait accepté en grommelant.

Mais il était d’abord parti chasser et, à minuit , il commit l’effroyable sacrilège de pénétrer dans l’église sur son cheval chargé d’une biche qu’il avait tuée..

Peu de temps après, désespérée de cet époux impie et violent, la Princesse Amélie se jeta un soir de pleine lune du haut de la tour Sud Ouest du château, qui porte aujourd’hui son nom. 

Elle fût emmurée debout dans une niche au pied d’un des nombreux escaliers du château. 

Et souvent, aux soirs de pleine lune, cette princesse bourguignonne aimée de son peuple apparaîtrait aux amoureux, sous la forme d’une biche blanche, se promenant sur les murailles du château…

En 1786 on retrouva sa dépouille mais on garda le secret….🌝🌗

La princesse Amelie ( de son vrai nom Émilie Antwerpiana d’Orange-Nassau ) a réellement existé : née en 1581 , elle obtient en 1627 le château de Montfort après la succession difficile de son père. Elle entreprend sur plus de 14 mois, d’importants travaux de réhabilitation du château à l’état dit-elle « de ruine » à son arrivée… 

Son passage à Montfort a fortement marqué les esprits ! 

À bientôt ! 🌙🌜🌓….

« Il est grand temps de rallumer les étoiles »

Et, pour Guillaume Apollinaire,
“Tous les astres intérieurs que l’on avait éteints”.

Ulan-Ude,       la cathédrale orthodoxe Odigitria

Très modestement, je vais essayer d’éclairer un brin votre journée , par une histoire qui, si elle n’était vraie, pourrait sembler un conte ..

Je réalisais enfin mon rêve de mettre mes pas dans ceux de Blaise Cendrars et j’étais “à mille lieues du lieu de ma naissance”,en République de Bouriatie, sur  la rive sud du lac Baïkal,« la mer Sacrée » des Bouriates,anciens nomades mongols à la culture mêlée de chamanisme et de boudhisme.

Mon voyage en transsibérien+ transmandchourien ( Moscou- Pékin)

Fermez les yeux et imaginez :

Je suis à la gare d’Ulan-Udé, après 5 magnifiques journées dans le Transsibérien. C’est un soir de la mi-décembre , il fait… – 32° et tout est blanc.

Et, comme je le fais toujours lors de mes voyages,
je n’ai rien réservé du tout car j’adore l’imprévu.

Un taxi me conduit donc dans un hôtel de son choix : un établissement très certainement luxueux dans les années 70-80 ,quelque peu défraîchi aujourd’hui..

ouf ! Sauvée, l’hôtesse parle anglais !

Je réserve immédiatement un sauna pour le lendemain après -midi ( j’ai vécu en Finlande et j’en connais le rituel et les bienfaits..)

Le sauna se trouve dans les sous-sols et me voilà seule dans un long couloir dont je ne trouve pas la lumière..j’avoue que je suis légèrement impressionnée car l’inquiétant fantôme bolchévique de Lénine rôde là, très présent dans ces murs..

J’aperçois une lueur tout au fond, une porte entrouverte sur une petite pièce et 2 femmes qui m’observent avec curiosité : l’une est russe, l’autre, bouriate de toute évidence.

Le Chien Noir

Quelques minutes de silence..

et soudain, à plus de 6 000 kms de toute “civilisation”moderne, aux confins de la Sibérie, dans ce lieu sombre et intemporel , Maria, la Bouriate, s’adresse à moi dans….un français parfait et sans aucun accent !!

—”Toi, tu es française !” CE n’est pas une question .Une certitude.

—”Oui, je m’appelle Maryse et je cherche le sauna..”

Maria est une petite bonne femme, au visage ridée comme une pomme qui transpire joie, humour et bonne humeur.Elle m’y conduit et je la laisse m’expliquer les rites du sauna que je connais déjà fort bien..

Je suis en pleine forme lorsque j’ai terminé et j’ai l’impression de rêver :

Le couloir est totalement lumineux, les fantômes ont laissé place à une trentaine de joyeuses personnes dans une très belle salle.

Maria  devant la porte avec un grand sourire malicieux:

—”Nous t’avons attendue pour commencer la fête ! Tu as cru que j’étais une employée de l’hotel , n’est-ce pas ? Non, je célèbre ici mes 60 ans avec tous mes amis. Et toi, tu es mon chien noir. “

—”🤔🤔🤔 ton chien noir ???

—”Dans notre culture bouriate, si nous rêvons d’un chien noir, c’est le symbole d’une nouvelle et très belle amitié. Et toi, Maryse, tu es venue de très loin pour être ce chien noir dont j’ai rêvé. Et tu m’apportes en cadeau l’immense plaisir de parler cette belle langue française que j’aime “.

Ce fut alors quelques heures extraordinaires avec tous ses amis, d’innombrables plats savoureux et du champagne à volonté ! 3 personnes parlaient français mais Maria était la seule à s’exprimer parfaitement..

—”Je suis née dans un petit village de 100 habitants, tout en haut du lac Baïkal.Mon père était pêcheur. Nous n’étions pas riches, les hivers étaient rudes mais nous étions heureux. Le régime soviétique avait imposé à l’école l’apprentissage d’une langue étrangère et mon village est tombé sur le français. Tout le village continue à parler le français et cette année ,nous y fêterons le cinquantenaire du français .Je me suis mariée ici et je vis donc à Ulan-Udé”

— ” as-tu rencontré d’autres français ? Comment fais-tu pour continuer à parler si parfaitement ?”

— ” non, tu es la première française que je rencontre, mais je lis beaucoup en français. Écoute ce poème de Verlaine que j’adore et que je t’offre ce soir:

Les sanglots longs des violons de l’automne
Blessent mon coeur d’une langueur monotone…”

Les émotions véritables se passent de mots… Et toute la soirée en fut emplie !!

Une amitié durable 

À la fin de la fête,Maria me déclara, en riant :

—”on m’avait dit que les français était snobs , mais tu ne l’es pas du tout.Alors,si tu veux, demain, je te ferai visiter ma ville et tu déjeuneras chez moi.Nous cuisinerons ensemble et tu apprendras à préparer une spécialité bouriate “

Bien sûr, cette très belle histoire ne s’arrête pas là.

Et je vous raconterai la suite la prochaine fois..

Dans 15 jours, 🦋🦋…